aux cailloux des chemins
Incroyable ! Les Nuits indormies ont eu le plaisir de décliner la couleur des mots de poètes aux voix bien différentes avec joie et enthousiasme.
Note interne (2) de Murièle Modély dans le recueil User le bleu
Puis j'ai pris le métro
la mort avait duré une heure et demie
juste le temps d'atteindre
la première plage
d'accueil
j'avais dans mon sac un sourire
pas mal de clients en attente
je bougeais à l'intérieur
contre le cuir
comme un chien fou
tout allait très bien
dans une poche, j'avais plié ma bouche
dans la rame, chacun avait rangé sa langue
chacun avait calé son regard
dans l'angle mort
où personne ne peut voir
les grincements de dents, l'aboiement silencieux
sous les lèvres étirées, les hurlements, hululements
tout va si bien depuis tellement longtemps
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FERDINANDEA de Stéphane Bernard dans le recueil Combattant varié
Il y a cette île, Ferdinandea, en mer de Sicile,
et qui n’existe qu’en de courtes périodes. Elle est
la tête hors de l’eau du volcan Empédocle à son réveil.
Sa colère le portant, Empédocle hissé se fait île.
Plus tard, quand le cratère s’apaise,
la mer s’insinue, fait des bouches éruptives calmées
des lacs où l’eau par chimie rougeoie.
L’île demeure encore un temps île,
puis plonge à nouveau. Le feu alors rendormi
rêve moins de dix mètres sous les vagues.
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Là où ici de Vincent Motard-Avargues
à peine commence-t-on à s’habituer à
quelqu’un que cette personne disparaît
à peine commence-t-on à se lover contre
un lieu qu’il finit par ne plus être nulle part
à peine commence-t-on à se fondre en
une époque qu’elle se dissout dans le temps
le mouvement / la vie
la fuite / l’existence
je connaissais ton nom… mon ami-e
je ne savais rien de toi
toutes ces parcelles de lumières
à corps d’ombres
nous sommes les empreintes
que nous ne laissons pas
d’ici je ne vois pas la lune
englobée dans les réverbères
la ville… hécatombe du naturel
tout s’y habille d’artifices
sous mes yeux la rocade défile… folle
tremblements nerveux du vide & du silence
je ne rêve pas d’un ailleurs lointain
puisque y vis en ce moment même
je ne peux pas partir d’où
je ne fais que partir
je reste & dans ce « je reste » il y a
tous les départs qui s’en vont
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Les Voix du venir de Charles Pennequin
Quand je parle j’ai l’impression d’être quelqu’un.
Il y a enfin vraiment quelqu’un
quand je me mets à parler.
Quelqu’un qui a une position et des idées.
Il a des trucs à dire quelqu’un.
Ça se voit tout de suite
quand il se met à parler.
Il est enfin quelqu’un.
Sinon il est rien.
Mais s’il s’entend le quelqu’un
il se rendra compte à quel point
c’est léger. C’est tout léger
et pourtant c’est quelqu’un.
C’est quelqu’un qui s’envole
quand il s’écoute parler.
Il s’envole tellement qu’il est léger.
Il se sent pas vraiment quelqu’un
même quand il écoute.
Et pourtant il pensait qu’il était
vraiment là. Vraiment enfin posé.
Dans son parler. Comme une pierre
une pierre qu’on lui poserait dessus.
Lui il a posé sa voix et c’est devenu
cette pierre posée.
Mais quand il s’écoute la pierre s’envole.
Y a quelqu’un qui prend les voiles
quand il s’entend enfin vraiment causer.
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Le vent souffle sur nos traces depuis toujours de Michel Bourçon
les yeux posés sur les lattes du parquet
l'esprit tente d'avoir leur apparence
lorsqu'elles brillent lisses
dans le matin qui se hisse sur la ville
pour les laisser ensuite
à leur immobilité
en considérant seulement la pièce à vivre
il n'y a plus en tête
l'idée de les voir
elles reviennent pourtant
une fois dehors
s'aligner impeccablement dans le souvenir
éphémère où elles luisent
comme les fruits d'un marronnier
qui tombent et hors de leur bogue
roulent çà et là sans demeurer
dans la conscience de l'arbre
Que de beaux textes. Un joli florilège !
RépondreSupprimerFélicitation pour vos 5 bebes.
RépondreSupprimerJe reviendrai lireles extraits que vous nous proposez
Frankie
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