Sur la piste cyclable longeant le ruisseau de Tirelagüe, me reviennent simultanément une phrase d'Edgar Morin et un fait remarquable dont mon grand-père fut le protagoniste.
Accepter les choses, mais se révolter en les acceptant.
N'y a-t-il pas dans notre force et notre faculté à nous révolter la preuve de notre humanité ?
N'y avait-il pas autre chose que de la malice dans l'escapade de mon grand-père le long du ruisseau longeant la maison de retraite où il avait "décidé" (!) de résider ?
Malicieux, il l'était car, avec quel délice m'a-t-il raconté combien le personnel était inquiet et l'avait cherché, alors que "vois-tu, je voulais juste aller voir ce qu'il se passait au terrain de rampeau..."
Se révolter en acceptant, quelle merveilleuse perspective quand le désir fait défaut. Savoir qu'il y a possibilité de révolte ouvre si intensément la pensée que la révolte ne nous oblige plus. L'idée de la chose, encore une fois, l'idée de la possible révolte est tellement plus savoureuse que l'acte en lui-même.
La révolte d'André, mon grand-père, était une boutade qu'il se faisait à lui-même, une façon de se prouver que, oui, il était bien vivant dans ce lieu dont on dit que l'on ne sort que les pieds devant ; lieu choisi en conscience, mais lieu de révolte encore un instant avant de capituler définitivement.
[Parce que le ruisseau longeant le Chant de Pins n'est pas de Tirelagüe mais son parallèle de Notre Dame, a-t-il voulu une dernière prière à la Vierge qu'il affectionnait tant ?]
En reprenant le vélo, je me suis demandée jusqu'à quand je serai capable, comme lui, de faire la place nécessaire à la révolte pour exister humainement.

(photo, Mimizan bourg, au bord du ruisseau de Tirelagüe, 11/7/18)

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